La Sylphide
Chorégraphie : Pierre Lacotte
Distribution : Les étoiles, les premiers danseurs et le Corps de Ballet de l'Opéra de Paris
Musiques : Jean Madeleine Schneitzhoeffer
Les origines du ballet
La Sylphide représente l’archétype du ballet romantique : la première interprète Maria Taglioni utilisa les pointes, le vaporeux tutu blanc descendant jusqu’ en dessous du genou, dessiné par Eugene Lamy, fit son apparition, sans oublier l’argument qui raconte l’histoire d’amour impossible vécue par James, tombé amoureux d’une créature irréelle. Ces éléments seront récurrents dans d’autres ballets définis comme “romantiques”, notamment Giselle.
L’idée de ce ballet naît à l’Opéra de Paris en 1831 à l’occasion de la représentation de Robert le Diable, de Meyerbeer; le ténor était Adolphe Nourrit, ami de Filippo Taglioni, auteur du livret et père de Maria Taglioni qui pendant cette production dansait le divertissement. Adolphe Nourrit remarqua la danseuse et suggéra à son ami Filippo de travailler Trilby ou le Lutin d’Argail, un ouvrage de l’écrivain français Emanuel Nodier, riche d’éléments romantiques et qui pouvait bien s’adapter à une chorégraphie. L’année suivante eut lieu la première représentation de la Sylphide à l’Opéra de Paris. Par rapport à l’argument de l’ouvrage, Filippo Taglioni apporta une inversion des rôles car la créature spirituelle était à l’origine masculine. Ce ballet marqua la consécration de Maria Taglioni comme “ballerine romantique”.
Dans les années suivantes, le ballet fut représenté à Londres-Covent Garden (juillet 1832), Saint Pétersbourg (1837), toujours avec Maria Taglioni, puis en Italie à Venice-Théâtre La Fenice(1837-1838), Turin-Théâtre Regio (1839), à Milan-Théâtre La Scala (1841) et à Rome-Théâtre Apollo en 1846, encore avec Maria Taglioni en fin de carrière.
La Sylphide a marqué les débuts du ballet romantique et il en reste le symbole. Toutefois, la dernière représentation de l’oeuvre de Filippo Taglioni fut donné en 1858 à Paris. Successivement le public a pu voir la version d’Auguste Bournonville qui, inspiré de l’interprétation de Maria Taglioni, souhaita créer sa Sylphide représentée au Théâtre Royal de Copenaghen en 1836.
Ce fut grâce à Pierre Lacotte qui travaillait pour un ouvrage sur le ballet romantique, que la version originale a pu être retrouvée. Pierre Lacotte pendant son travail de recherche découvrit certains documents originaux et décida de reconstruire le ballet qui fut d’abord filmé pour la télévision française et diffusé le 1 janvier 1972. A la suite du succès de la critique, il fut remonté à l’Opéra National de Paris. Ghislaine Thesmar fut la première Sylphide de cette reconstruction.
La Sylphide aujourd’hui
Cyril W.Baumont dans son ouvrage Complet book of Ballet, confirme la valeur historique de la Sylphide, ballet sans doute initiateur du style romantique. Pour le comprendre jusqu’au bout aujourd’hui, il faut se laisser aller pour saisir toute la beauté et la précieuse élégance de la chorégraphie, rentrer dans les atmosphères mystérieuses et en même temps riches d’émotions et enfin pouvoir rêver à côté des protagonistes . Quant à la chorégraphie, elle brille par sa variété, par son art des figures, des tableaux et des ensembles, par son raffinement, par la richesse de la batterie qui y est déployé — tous les pas où les pieds “battent”, comme l’entrechat et la cabriole par exemple ; l’écriture de Filippo Taglioni est, en quelque sorte, plus “ornée” — au sens de l’ornementation musicale baroque — que celle de Marius Petipa.
L’Opéra National de Paris reprend ce ballet après la tournée au Japon du mois de mars dernier pendant laquelle Hugo Marchand, aujourd’hui encore interprète dans le rôle de James, avait été nommé étoile. Á ses côtés on retrouve la délicieuse et séduisante Amandine Albisson, sa partenaire pendant la tournée japonaise. Le couple ne manque pas au rendez-vous sur les scènes de l’Opéra Garnier. Les mouvements de la danseuse étoile ont la légèreté d’une plume, surtout quand elle s’approche de James; en particulier, ses ports de bras sont invisibles, dans le respect du personnage qu’elle incarne. Amandine Albisson montre une grande habilité technique dans les petits sauts et une grande maîtrise dans les petits pliés qui adoucissent l’exécution des pas.
Hugo Marchand a une allure noble pour la qualité de l’exécution de ses mouvements. Avec son physique allongé, de grande taille, il domine la scène soit dans les passages plus techniques, réservés aux variations riches de grands sauts et pirouettes soit dans les scènes où son rôle d’amoureux doit prendre le dessus. La jeune étoile aura l’occasion la saison prochaine de consolider et valoriser son titre d’étoile. Á côté de deux interprètes principaux dans le rôle d’Effie, la future épouse trahie, le public retrouve la raffinée première danseuse Hannah O’Neill. Remarquable aussi le pas de deux des deux écossais du premier acte, Marion Barbeau et le premier danseur Emmanuel Thibault en pleine syntonie avec sa danseuse aux belles lignes. Et pour remarquer les aspects romantiques hérités par d’autres ballets successifs à la Sylphide, on ne peut pas ignoré le passage où James essaie de reconnaître son aimée parmi ses compagnes, comme fait le prince Albrecht dans le final du Lac des Cygnes. Ne boudons pas notre plaisir en reconnaissant la valeur de ces ballets qui, indubitablement, sont ancrés dans le patrimoine de la danse classique.
La Sylphide sera représentée à l’Opéra National de Paris jusqu’au 16 juillet. Dans le rôle d’ interprètes principaux se succéderont les étoiles Myriam Ould-Braham avec Mathias Heymann (12 juillet), Léonor Baulac avec Germain Louvet (15 juillet), Ludmila Pagliero avec Josua Hoffalt (10 et 14 juillet) et dans la matinée du 16 juillet les premiers danseurs Hannah O’Neill avec Vincent Chaillet.