Tout doit disparaitreT
Le Théâtre National de la Danse – Chaillot, à Paris, ouvre la saison 2019-20 mettant à l’honneur Philippe Decouflé et sa compagnie, du 27 Septembre au 6 Octobre prochains.
Ce danseur et chorégraphe nous convie à découvrir toutes les facettes de sa créativité avec une proposition ouverte et stimulante à double titre. Les spectateurs sont invités à la fois à investir des lieux historiques mythiques et à fouiller dans la mémoire du répertoire de sa Compagnie DCA, sans que rien ne paraisse poussiéreux et figé.
Avec la conception de Tout doit disparaître, quarante artistes -danseurs, comédiens, acrobates, musiciens, compositeurs- sont à l’épreuve avec la présentation de morceaux choisis, transmis, repris avec des corps d’aujourd’hui, des moyens techniques contemporains, des états sociétaux différents, mêlant traces, omissions, remémorations et recréations.
Le choix du public est donc vaste au gré d’une longue déambulation libre (de l’ordre de 4h) qui fait parcourir ce temple de « l’art déco » construit en 1937, offrant aux regards des œuvres célèbres. Au-delà du cheminement du grand escalier et du Grand Foyer face aux jardins du Trocadéro et de la Tour Eiffel dont on aime redécouvrir la majesté, c’est l’exploration de vastes espaces richement ornés de peintures, fresques, sculptures (œuvres de Maillol, Denis, Bonnard, Vuillard…) adjacents aux salles Jean Vilar et Firmin Gemier (et à un petit studio Maurice Béjart) ; c’est l’utilisation profitable de tous recoins du théâtre.
Philippe Découflé y déploie son talent. Il se dit imprégné des initiatives de ses maitres à leur époque, dont O. Schlemmer du Bauhaus, A. Nikolaïs, M. Cunningham et Tex Avery, l’amenant à jongler et entremêler souvent avec drôlerie les arts vivants.
Qu’on se rappelle son éclectisme avec -par exemple- sa Parade pour l’ouverture grandiose des Jeux Olympiques d’Hiver d’Albertville et de la Savoie (1993) ; avec Le p’tit bal (1995) intimiste filmant deux danseurs ingénus assis côte à côte reprenant en langage signé stylisé la chanson populaire C’était bien… et ses Nouvelles pièces courtes (2018) dédoublant et pixellisant les mouvements dansés dématérialisés et leurs ombres.
Le spectacle Tout doit disparaître, promet un catalogue ingénieux de figures musicales, visuelles et de performances qui sollicitent tous public : courts métrages, vidéos, effets kaléidoscopiques et dramaturgiques, installations ludiques et interactives, illusions d’optiques (« Les opticons » ou collections numérotées en constante évolution) et, bien sûr, des extraits de pièces connues programmées en alternance dans les deux salles (Tranche de cake, Triton, Petites Pièces Montées, Decodex, Shazam, Sombrero, Cœurs croisés, Octopus, Contact, Wiebo). On célèbre trente-cinq de créativité et éclectisme!
Jocelyne Vaysse