La Bayadère
Chorégraphie : Rudolf Noureev
Distribution : Ballet du Théâtre La Scala de Milan
Musiques : Ludwig Minkus avec l'orchestration de John Lanchbery
La Bayadère est un ballet qui fascine et séduit depuis ses premières représentations par l’atmosphère et les sensations exotiques qui s’en dégagent. L’une des premières interprètes célèbres fut l’italienne Maria Taglioni, la danseuse emblème du ballet romantique, qui joua en 1830 à Paris Le Dieu et la Bayadère, reproduisant les ambiances de l’Inde sur scène.
D’un point de vue historique, Marius Petipa créa la première version, associant le livret de Sergue Khoudekov et la musique de Minkus.
Ce ballet fut donné au Grand Théâtre de St. Petersburg avec un vif succès (1877), ce qui ouvra les portes à ses futures productions, en particulier la Belle au bois dormant (1890) et le Lac des cygnes (1895).
L’histoire entre Solor et la prêtresse Nikiya, qui a toujours captivé les spectateurs, était ignorée en Europe jusqu’à la venue du Ballet Kirov à l’Opéra Garnier de Paris : un danseur de 23 ans nommé Rudolf Noureev émerveilla le public. Par la suite, c’est seulement le passage des Ombres, extrait de l’Acte III, que l’on présentera en Europe. Le chorégraphe russe le reprend d’abord pour le Royal Ballet de Londres en 1963, et – à l’invitation de Rolf Liebermann – pour le Ballet de l’Opéra de Paris en 1974. Ce fut seulement le 8 Octobre 1992 que Rudolf Noureev, malgré sa maladie, créa pour l’Opéra de Paris sa version complète, s’inspirant au maximum de celle originale de Marius Petipa. Ce sera son dernier ballet.
Manuel Legris, directeur du Ballet du Théâtre La Scala de Milan et l’un des interprètes majeurs du rôle de Solor quand il était étoile à l’Opéra de Paris, a décidé de programmer la Bayadère de Rudolf Noureev pour l’ouverture de la saison 2021-2022 , une première absolue pour le théâtre milanais et une nouvelle production avec les scènes et les costumes de Luisa Spinatelli. Malheureusement la reprise de l’épidémie de la COVID-19 a dérangé les représentations, compte tenu du nombre élevé d’interprètes contaminés, notamment certains premiers danseurs. Après la première au mois de décembre, les représentations n’ont repris qu’en janvier. Dans les soirées du 25 et 26 Janvier les rôles principaux de Nikiya et Solor étaient interprétés par la soliste Vittoria Valerio et le premier danseur Claudio Coviello ; dans le rôle de Gamzatti ont alterné la jeune Alice Mariani – une belle découverte – et la première danseuse Virna Toppi.
La fragilité psychologique de Nikiya est incarnée par Vittoria Valerio, sûrement plus lyrique dans la deuxième soirée, montrant une meilleure maîtrise de son rôle dès la première variation du premier acte. Son physique menu exprimait toute sa vulnérabilité et sa faiblesse face à son destin. Elle ne pourra pas s’unir à Solor car il devra épouser la fille du rajah Gamzatti.
Dans la danse du tambour, Stefania Ballone et Cristian Fagetti sont remarquables dans la soirée du 25 janvier : avec une grande énergie les deux danseurs ont suivi le rythme de la partition et ont magnifié la scène. L’acte des ombres, si spirituel et éthéré, a maintenu son charme malgré le nombre réduit de danseuses dû à la pandémie sus-évoquée. La séquence de leurs arabesques qui ne semblent jamais s’arrêter jusqu’à s’étendre à l’infini rend le troisième acte « unique ». Nikiya et Solor peuvent couronner leur union seulement dans un monde onirique, en pleine liberté. Claudio Coviello (Solor) est superbe dans les manèges et il incarne une figure très délicate et expressive dans les pas de deux avec Vittoria Valerio (Nikiya).
A signaler aussi les performances de l’Idole d’or (Mattia Semperboni et Federico Fresi) ainsi que la présence du premier danseur Mick Zeni dans le rôle du rajah qu’il prendra sa retraite au terme des représentations de la Bayadère.
On salue le grand effort de tous les danseurs qui ont su s’investir pour le bon déroulement des représentations malgré les conditions non optimales.
Le Ballet du Théâtre de la Scala de Milan reviendra sur scène le 11 Mars prochain avec Joyaux de George Balanchine.
Théâtre La Scala de Milan, Janvier 2022
Antonella Poli