Roaratorio

Dans le cadre du festival d’Automne à Paris, le Théâtre de la Ville accueille la Merce Cunningham Dance Company. Deux programmes sont à l’affiche.

Le premier se compose de trois ballets, Pond Way, Second Hand, Antic Meet et le second présente Roaratorio, chef d’oeuvre du chorégraphe américain.

Roaratorio se caractérise par la rencontre de trois artistes de génie, James Joyce, Johnn Cage et Merce Cunningham.

Le ballet a été crée sur une musique de John Cage, Roaratorio, an Irish Circus on Finnegans Wake (1981) orchestrée en grande partie à l’Ircam de Paris à partir d’enregistrements effectués sur les lieux ou se déroule le roman Finnegans Wake de James Joyce.

Le concept musical de cette oeuvre se fonde sur une idée chère à Johnn Cage : mettre en musique un texte littéraire. En l’occurrence, le musicien s’inspire du texte de James Joyce pour réaliser une pièce unique, structurée en séquences autonomes, dans lesquelles trois éléments peuvent être aisément distingués :

– La création d’une grande variété de sons qui semble retranscrire la composition littéraire de l’écrivain irlandais qui utilisait un important nombres de mots dans ses oeuvres ;

– Un complexe d’effets sonores, élaborés et reproduits à partir du texte, souvent enregistrés en Irlande ou autres lieux géographiques mentionnés dans le roman.

La musique s’apparente à la littérature par la multitude d’effets sonores tels que tonnerre, explosions, bris de verre, chants d’oiseaux, cloches mais aussi sons enregistrés d’un violon, d’une voiture qui démarre, de pleurs d’un bébé, un chien qui aboie, de tourbillons d’eau.

  • – La musique traditionnelle irlandaise, reprise dans toutes ses formes.

Il en résulte une composition unique et remarquable.

En effet, tous ces éléments ne sont pas destinés à créer une harmonie, aucun lien ne les unit, rien ne s’entend comme linéaire dans cette partition musicale. Ceci explicite le titre « Un Irlandais Circus, » présent dans cette oeuvre de Cage.

Il est intéressant de souligner que le mot Roaratorio provient du mot anglais roar qui signifie grondement, et de oratorio.

Cela peut vouloir signifier qu’il n’y a pas de dissonance entre musique sacrée des églises et composition sonore de la vie quotidienne comme par exemple les grondements. Toutes les deux sont, en fait, liées, associées, beaucoup plus qu’on imagine.

La chorégraphie qui met en scène des danseurs habillés en tenues de studio de différents coloris, dévoile tout l’esprit de recherche de Merce Cunningham. Un style non narratif et non symbolique. Le chorégraphe explore la variété des lignes de la spatialité, en créant ses propres espaces avec une harmonie parfaite qui ne contraste pas avec la partition musicale.

La danse devient élément pur, elle se construit tout au long de la pièce à travers les différentes constructions géométriques reproduites par les mouvements tout à fait linéaires. De grande originalité, Roaratorio entraîne le spectateur vers un flux d’images et de sonorités quasi chaotiques qui retrouvent leur équilibre grâce à l’acuité et le raffinement artistiques de Merce Cunnigham.

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