Transverse Orientation
Chorégraphie : Dimitris Papaioannu
Transverse Orientation de Dimitris Papaioannu a été présenté en première mondiale à la Biennale de la Danse de Lyon 2021.
Le chorégraphe s’appuie sur ses origines culturelles puisant dans la mythologie grecque mais pas seulement pour ouvrir au public une réflexion sur l’identité de la nature humaine, sur son corps et ses instincts. Certes, il emploie aussi des références tirées de l’art figuratif restant fidèle à ses inclinations et confirmant encore une fois ses qualités artistiques et l’originalité de ses idées créatives.
Des danseurs apparaissent sur scène, un à un : ils incarnent des créatures du peintre Giorgio De Chirico, « sans visages », toutes égales, anonymes et en costumes noirs.
Leurs mouvements n’ont aucune valeur expressive, semblant mécaniques à l’image des marionnettes. Un seul bruit semble attirer leur attention et les faire réagir : le tremblement de la lumière d’un néon placé sur un fond de scène blanc.
Soudainement l’entrée en scène d’un taureau puissant dans ses mouvements ouvre un discours introspectif sur le rapport de l’homme à son corps et à son animalité. C’est un questionnement identitaire qui interroge ses pulsions, ses instincts et les agissements qu’il pourrait assumer. Un homme vainc le minotaure, claire référence à Thésée dans l’épisode de la mythologique grecque et il est aussi cette masse virile dans Guernica et ce monstre lubrique dont Picasso fait l’éloge. Ici, en même temps, il semble accoucher d’une femme aux allures pures et immaculées. Le contraste qui se produit entre le corps imposant et noir de la bête et cette apparition vivante et angélique est rendu avec grâce et délicatesse.
Les corps humains se transforment en créatures hybrides, mi-homme, mi-animal produisant des images esthétiques emblématiques et riches de significations. Ce propos est confirmé par l’arrivée impromptue sur scène d’une sirène ou par la représentation d’une fellation entre un homme et un animal, ou bien encore quand le sexe d’une femme est symbolisé par un oursin délicieusement goûteux. Mais Dimitris Papaioannu interroge la valeur de la sexualité, d’une part masculine en la rendant insignifiante et impuissante, d’autre part féminine en valorisant l’expérience de la maternité. L’accouchement d’une femme évoquant les beautés les splendeurs botticelliennes est rendu sans aucune ambiguïté. L’usage soigné des corps nus n’a aucun caractère érotique ou sexuel mais plutôt la nudité fait émerger une beauté naturelle intrinsèque au corps qui dépasse les modelés anatomiques.
Après cette réflexion nourrie autour de l’identité corporelle, la scène se transforme en un lac imaginaire avec des rochers émergeant au fil de l’eau, toute créature vivante disparait sauf une : un homme dans une solitude totale s’essaie à ramasser, de manière utopique, les eaux qui le cernent.
Transverse Orientation sera repris lors du festival Montpellier Danse les 2 et 3 Juillet prochains.
TNP, Villeurbane 5 Juin 2021
Antonella Poli