Casse-Noisette
Chorégraphie : Kader Belarbi
Distribution : Ballet du Capitole de Toulouse
Musiques : Piotr Ilitch Tchaïkovski
Après Giselle et Le Corsaire, Kader Belarbi, directeur du Ballet du Capitole de Toulouse, signe une nouvelle version de Casse-Noisette, un autre grand classique qui confirme la volonté du chorégraphe de nous donner de nouvelles lectures d’anciens ballets du répertoire tout en restant ancré dans le patrimoine.
Plusieurs versions de Casse-Noisette sont inscrites dans l’histoire de la danse : la première, celle de Petipa et Ivanov, puis celles de Balanchine, Noureev et Béjart. Ce ballet célèbre normalement la période des fêtes car l’argument se développe à partir de la nuit de Noël.
Kader Belarbi reste fidèle à cette tradition mais il revisite l’argument pour le rendre plus humain et plus théâtral, plus joyeux et coloré. Dès le début, le spectateur ne doit pas s’attendre à la présence sur scène du classique sapin de Noël. Marie, la jeune fille protagoniste (normalement Clara dans les versions plus anciennes), vit dans un pensionnat avec d’autres enfants parmi lesquels des orphelins. Le jour de Noël arrive et Drosselmeyer, le directeur de l’établissement, distribue des cadeaux à tous. La nuit arrive, tous dorment et la jeune Marie, pas encore endormie, veut récupérer son cadeau, un casse-noisette en forme de hussard caché dans une armoire. Surprise, dès que le placard s’ouvre, son casse-noisette s’est transformé en un pantin animé et la Reine des Arachnides passe à l’attaque avec ses troupes. C’est un beau moment de danse, très énergique. Dans la lutte, Casse-Noisette perd son bras. Voilà une autre nouveauté. Le célèbre pas de deux du premier acte des versions antérieures se transforme ici en un duo dansé par les deux interprètes, Marie et Casse-Noisette, comme un bal plein de tendresse entre marionnettes. En plus, l’absence d’un bras pour l’un des deux personnages rend encore plus difficile son exécution, notamment dans les pirouettes.
Kader Belarbi transpose tout l’aspect féérique du conte dans le deuxième acte. C’est ici qu’on retrouve les célèbres passages de la musique de Tchaïkovski, La Valse des Fleurs et La Valse des Flocons de Neige. Mais, entre les deux, le chorégraphe conçoit un voyage très vivant dans des mondes imaginaires peuplés par des grenouilles et des crapauds espagnols, un Calife à mille pattes, des frères siamois, des Poupées russes, des Polichinelles et un Bonhomme de neige, à travers lequel on veut retrouver le bras de Casse-Noisette perdu. Les costumes sont très vivaces, l’atmosphère est gaie, et les décors imposants justifient de l’important travail scénique d‘Antoine Fontaine.
L’aventure continue dans le Royaume des Neiges, autre moment clé du ballet car, par magie, Casse-Noisette devient un prince et Marie une princesse. Le pas de deux dansé par Natalia de Froberville et Ramiro Gómez Samón conserve ici tout son aspect royal, dans la plus belle tradition. Le moment magique s’arrête et l’on se retrouve dans le dormitoire initial, avec Casse-Noisette redevenu un être inanimé et Clara très déçue. Mais l’arrivée au pensionnat d’un nouveau jeune homme ressemblant à celui avec qui Clara avait voyagé dans l’imaginaire, ou pourquoi pas aussi dans le réel, redonne le sourire à la jeune fille qui semble avoir retrouvé son compagnon d’aventures. Cette superposition sans limites discernables entre magie et réalité est un des points forts de ce Casse-Noisette qui laisse rêver et témoigne de la volonté qu’a Kader Belarbi de reconstituer un ancien conte avec une vision plus moderne. Outre que reconnaître tout le mérite des danseurs mis en valeur par une chorégraphie qui privilégie de grands moments d’ensemble, un éloge va aussi à tous les techniciens qui ont effectué habilement des changements de décors plus propres à un opéra qu’à un ballet.
Au Théâtre du Capitole de Toulouse jusqu’au 31 décembre 2017
Antonella Poli