La Valse-Symphonie en C-Shéhérazade

Chorégraphie : Stefania Ballone, Marco Messina et Stefano Gavazzi (La Valse), Balanchine (Symphonie en C), Eugenio Scigliano (Shéhérazade)

Distribution : L'étoile Roberto Bolle, les premiers danseurs et le Corps de Ballet du Théâtre LaScala

Musiques : Ravel ( La Valse), Bizet ( Symphonie en C), Rimski-Korsakov (Shéhérazade)

Le Théâtre La Scala de Milan  continue à renouveler son répertoire tout en s’ouvrant à la danse contemporaine. Jusqu’au 13 Mai, elle présentera un triptyque de ballets dont deux nouvelles créations, La Valse, sur les musiques de Ravel avec les chorégraphies de Stefania Ballone, Marco Messina et Stefano Gavazzi et Shéhérazade d’Eugenio Scigliano, sur la partition de Rimsky Korsakov.

Stefania Ballone, Marco Messina et Stefano Gavazzi sont trois danseurs du Corps de Ballet de la Scala qui ont déjà montré dans le passé leurs capacités en tant que chorégraphes. Ravel considérait son poème chorégraphique paru en 1920 comme un « tourbillon fantastique et fatal » et plus précisément, en tête de la partition, on peut lire : « Des nuées tourbillonnantes laissent entrevoir, par éclaircies, des couples de valseurs. Elles se dissipent peu à peu : on distingue une immense salle peuplée d’une foule tournoyante. La scène s’éclaire progressivement. Une Cour impériale, vers 1855».

Les trois chorégraphes s’inspirent parfaitement de ces idées en réusissant à récréer sur scène le tourbillon dont Ravel parle. Chaque couple exécute des mouvements différents ; l’œil du spectateur ne peut les suivre qu’avec difficulté tellement leur rythme est incessant, sans aucune pause. Certains moments évoquent la valse, mais ils ne sont pas si évidents. L’impression dégagée par la pièce est celle d’un univers qui oscille entre apparition et disparition ; un couple est au centre de ce tourbillon sombre éclairci par moment par des lumières claires. Cette nouvelle version de la chorégraphie présentée à la Scala nous livre une vision complètement nouvelle de cette pièce qui fut présentée à l’Opéra de Paris le 23 Mai 1929 par la compagnie d’Ida Rubinstein, avec la chorégraphie de Bronislawa Nijinska et les décors et costumes d’Alexandre Benois, après le refus de Diaghilev d’utiliser cette musique pour une de ses productions. Seuls les costumes nous rappellent les années vingt, le langage chorégraphique étant complétement contemporain, avec une grande attention portée aux ports des bras parfois saccadés. L’écriture chorégraphique des trois auteurs est claire et reproduit toute l’intensité de la partition musicale.  

Le deuxième ballet au programme, Symphonie en C, un des chefs d’œuvre de Balanchine, est interprété de manière époustouflante par les danseurs de La Scala. L’étoile Roberto Bolle, avec Nicoletta Manni, Vittoria Valerio, Virna Toppi, Martina Arduino, Claudio Coviello, Marco Agostino et Timofej Andrijashenko en tant qu’interprètes principaux, ont enchanté le public avec l’allégresse de leur danse.

En quatre mouvements, le chorégraphe s’appuie sur la tradition de la danse classique tout en laissant son empreinte de grand maître. Les femmes sont en tutus scintillants et les hommes en noir, créant un choc visuel si l’on tient compte aussi du fond de la scène bleu ciel. Le premier mouvement révèle toutes les capacités techniques des interprètes  et toute la vivacité de la chorégraphie qui n’oublie jamais la musique. Le deuxième devient plus lyrique et le troisième laisse la place à des sauts tout en sauvegardant une attention particulière aux bras.

Le quatrième mouvement résume tout ce qu’on a pu admirer dans les précédents. Il est joyeux, irrésistiblement fantastique. Chaque geste est surprenant et, malgré la rapidité des pas, les interprètes ne montrent aucune défaillance. Avec Symphonie en C, le public se régale et peut apprécier tout le génie de Balanchine.

La troisième pièce de la soirée, Shéhérazade, sur le poème symphonique de Rimski-Korsakov, est confiée à Eugenio Scigliano. Il reprend le ballet présenté à l’Opéra de Paris en 1910 pour les Ballets Russes avec la chorégraphie de Michel Fokine et les décors et costumes de Léon Bakst.

Le chorégraphe italien se plonge dans l’argument du conte des Mille et une nuits et livre une version épurée et essentielle de la chorégraphie qui a ses points forts dans les aspects dramatiques qui caractérisent la pièce. Le rôle principal est dansé par la jeune soliste Virna Toppi qui incarne très bien le personnage de l’héroïne lyrique, sensible et porteuse d’une charge dramatique remarquable. Le sultan Shariar est interprété par Gioacchino Storace et l’Esclave d’or par Nicola del Freo.

La scénographie constituée par des panneaux rouge et noir contribue à accentuer la force de cette pièce qui se révèle une surprise grâce à un langage simple mais doué d’une charge théâtrale intéressante.

 

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